Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, I.djvu/193

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vrai que le bas peuple d’Écosse consomme de la farine d’avoine pour la plus grande et la meilleure partie de sa nourriture, qui, en général, est fort inférieure à celle des personnes de la même classe en Angleterre. Mais cette différence dans leur manière de subsister est seulement l’effet de la différence qui existe dans leurs salaires, quoique, par une étrange méprise, je l’aie souvent entendu considérer comme en étant la cause. Ce n’est pas parce qu’un homme roule carrosse tandis que son voisin va à pied, que l’un est riche et l’autre pauvre ; mais l’un roule carrosse parce qu’il est riche, et l’autre va à pied parce qu’il est pauvre.

Pendant le cours du siècle dernier, une année dans l’autre, le grain a été plus cher dans chacune des parties des deux royaumes, que pendant le cours de celui-ci[1]. C’est là une vérité de fait sur laquelle on ne peut maintenant élever de doute raisonnable, et la preuve en est même bien plus décisive, s’il est possible, pour l’Écosse que pour l’Angleterre ; elle est fondée sur les relevés authentiques des marchés publics, qui sont des évaluations, faites sur serment, d’après l’état actuel des marchés, de toutes les diverses espèces de grains, dans chaque différent comté d’Écosse[2]. Si une preuve aussi directe avait besoin de quelque témoignage accessoire pour la confirmer, je ferais observer que la même chose a eu également lieu en France, et probablement dans la plupart des autres pays de l’Europe. Quant à la France, la preuve est la plus claire possible. Mais s’il est certain que, dans chacune des parties du Royaume-Uni, le grain a été un peu plus cher dans le dernier siècle que dans celui-ci, il est également certain que le travail y a été à beaucoup plus bas prix. Si le travail des individus pauvres a pu leur suffire alors à soutenir leurs familles, il doit donc les mettre aujourd’hui dans une plus grande aisance[3]. Dans le dernier siècle, le salaire journalier

  1. Cela est vrai du dix-huitième siècle (le siècle contemporain de la publication du texte), seulement jusqu’à 1765. De 1765 à 1820, les prix de toutes les espèces de grains en Angleterre, dépassèrent de beaucoup la moyenne des époques précédentes. Depuis 1820, ils sont retombés à peu près à l’ancien niveau. Mac Culloch.
  2. Ces relevés se nomment fiars en Écosse, et c’est la même chose que les registres des marchés et prix des grains ou mercuriales, tenus dans la plupart des villes et bourgs de France par les officiers de police.
  3. Il ne faut pas oublier que ces remarques du docteur Smith ne s’appliquent qu’à la condition des travailleurs en 1775. Mac Culloch.