Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, I.djvu/590

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qu’il semble, les manufactures de draps fins qui fleurirent anciennement en Flandre, et qui s’introduisirent en Angleterre au commencement du règne d’Élisabeth, et telles sont aujourd’hui les fabriques d’étoffes de soie de Lyon et celles de Spital-Fields. Les manufactures qui s’introduisent de cette manière travaillent en général sur des matières premières tirées de l’étranger, puisqu’elles sont elles-mêmes une imitation de manufactures étrangères. Lors du premier établissement de la manufacture de Venise, elle tirait toutes ses matières de la Sicile et du Levant. La manufacture de Lucques, qui était plus ancienne, travaillait de même sur des matières premières venant de l’étranger. L’usage de cultiver les mûriers et d’élever les vers à soie ne paraît pas avoir été commun dans les pays du nord de l’Italie avant le seizième siècle. Ces arts ne furent introduits en France que sous le règne de Charles IX. Les manufactures de Flandre travaillaient principalement les laines d’Espagne et d’Angleterre. La laine d’Espagne a été la matière première, non de la première manufacture de lainage établie en Angleterre, mais de la première dont les produits aient été destinés à se vendre au loin. Aujourd’hui, plus de la moitié des matières premières qu’on emploie aux fabriques de Lyon sont des soies étrangères ; à l’époque de l’établissement de ces fabriques, on n’en employait pas d’autre, ou presque point d’autre. Il est vraisemblable que, dans les matières premières manufacturées à Spital-Fields, il n’y en aura jamais une seule partie qui soit produite en Angleterre. Ces manufactures étant, en général, le résultat des spéculations d’un petit nombre de particuliers, le lieu de leur établissement est quelquefois une grande ville maritime, quelquefois une petite ville de l’intérieur des terres, suivant qu’il s’est trouvé que les fondateurs ont choisi l’une ou l’autre d’après leur intérêt, leur jugement ou leur caprice.

D’autres fois, des manufactures destinées à des marchés éloignés se sont élevées naturellement et, pour ainsi dire, d’elles-mêmes, par le perfectionnement successif de ces fabriques grossières et domestiques qui s’établissent toujours nécessairement dans tous les temps, même dans les pays les plus pauvres et les moins civilisés. Ces sortes de manufactures travaillent, en général, des matières produites dans le pays, et il paraît qu’elles se sont souvent perfectionnées d’abord dans des localités de l’intérieur des terres, qui, sans être à un très-grand éloignement des côtes de la mer, s’en trouvaient placées à une distance assez considérable, et quelquefois même privées de tout moyen de transport