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Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/31

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rait qu’une bien pauvre ressource pour soutenir une guerre étrangère qui serait dispendieuse et qui durerait plusieurs années.

C’est encore une bien plus pauvre ressource, comme l’expérience l’a toujours fait voir, que de fondre la vaisselle des particuliers. Cet expédient fut employé par les Français au commencement de la dernière guerre, et le service qu’ils en tirèrent ne compensa pas même la perte de la façon.

Un trésor amassé dans les coffres du prince fournissait, dans les anciens temps, une ressource plus importante et plus durable. Dans ce siècle, si vous en exceptez le roi de Prusse, il ne paraît pas que l’idée d’amasser des trésors entre pour rien dans la politique des princes de l’Europe.

On ne voit pas qu’aucun de ces trois moyens, l’exportation de l’argent circulant, ou de la vaisselle des particuliers, ou du trésor du prince, ait beaucoup contribué à l’entretien des guerres étrangères faites dans ce siècle, les plus dispendieuses peut-être dont l’histoire fasse mention.

La dernière guerre de France coûte à la Grande-Bretagne au-delà de quatre-vingt-dix millions, en comptant non-seulement les soixante-quinze millions de dettes nouvelles qui ont été contractées, mais encore les deux schellings pour livre additionnels à la taxe foncière, et ce qui a été emprunté annuellement du fonds d’amortissement. Plus des deux tiers de cette dépense ont eu lieu dans des pays éloignés, en Allemagne, en Portugal, en Amérique, dans les ports de la Méditerranée, dans les Indes orientales et occidentales[1]. Les rois d’Angleterre n’avaient pas amassé de trésor ; nous n’avons pas entendu dire qu’il y ait eu aucune quantité extraordinaire d’argenterie mise au creuset. Quant à l’or et à l’argent de la circulation, on a pensé qu’ils n’avaient jamais excédé dix-huit millions ; néanmoins, d’après la dernière refonte de la monnaie d’or, il est à croire que ce calcul est fort au-dessous de la vérité[2] ; mais supposons, d’après le compte le plus exagéré que je puisse me rappeler en avoir vu ou entendu faire, que l’or et l’argent ensemble

  1. D’après un compte soumis au Parlement, il parait que l’argent dépensé pendant cette guerre, sur le continent seul de l’Europe, s’éleva à 20,625,997 livres sterling (plus de 500 millions de francs). Buchanan.
  2. Lord Liverpool estime à plus de 20 millions sterling le nombre de guinées rapportées à la Monnaie pour y être refondues, indépendamment de près de 6 millions qu’on suppose être restés dans la circulation. Buchanan.