Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/389

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suffisant pour couvrir leur dépense, sans grever d’aucune charge le revenu commun de la société.

Une grande route, un pont, un canal navigable, par exemple, peuvent le plus souvent être construits et entretenus avec le produit d’un léger droit sur les voitures qui en font usage ; un port, par un modique droit de port sur le tonnage[1] du vaisseau qui y fait son chargement ou son déchargement. La fabrication de la monnaie, autre institution destinée à faciliter le commerce, non-seulement couvre sa propre dépense dans plusieurs pays, mais même y rapporte un petit revenu ou droit de seigneuriage au souverain. La poste aux lettres, autre institution faite pour le même objet, fournit, dans presque tous les pays, au-delà du remboursement de toute sa dépense, un revenu très-considérable au souverain.

Quand les voitures qui passent sur une grande route ou sur un pont, ou les bateaux qui naviguent sur un canal, payent un droit proportionné à leur poids ou à leur port, ils payent alors pour l’entretien de ces ouvrages publics, précisément dans la proportion du déchet qu’ils y occasionnent. Il paraît presque impossible d’imaginer une manière plus équitable de pourvoir à l’entretien de ces sortes d’ouvrages. D’ailleurs, si ce droit ou taxe est avancé par le voiturier, il est toujours payé en définitive par le consommateur, qui s’en trouve chargé dans le prix de la marchandise. Néanmoins, comme les frais du transport sont extrêmement réduits au moyen de ces sortes d’ouvrages, la marchandise revient toujours au consommateur, malgré ce droit, à bien meilleur marché qu’elle ne lui serait revenue sans cela, son prix n’étant pas autant élevé par la taxe qu’il est abaissé par le bon marché du transport. Ainsi, la personne qui paie la taxe, en définitive, gagne plus par la manière dont cette taxe est employée, qu’elle ne perd par cette dépense. Ce qu’elle paie est précisément en proportion du gain qu’elle fait. Dans la réalité, le payement n’est autre chose qu’une partie de ce gain qu’elle est obligée de céder pour avoir le reste. Il paraît impossible d’imaginer une méthode plus équitable de lever un impôt.

Quand cette même taxe sur les voitures de luxe, sur les carrosses, chaises de poste, etc., se trouve être de quelque chose plus forte, à proportion de leur poids, qu’elle ne l’est sur les voitures d’un usage nécessaire, telles que les voitures de roulier, les chariots, etc., alors l’indolence

  1. Nombre de tonneaux qui forment la contenance du vaisseau.