Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, II.djvu/489

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glise de tous les gens de lettres supérieurs qui peuvent s’y trouver.

C’est peut-être une chose qui mérite d’être observée, que si nous en exceptons les poètes, un petit nombre d’orateurs et quelques historiens, la très-majeure partie des autres gens de lettres d’un ordre supérieur, tant à Rome que dans la Grèce, paraissent avoir été des professeurs publics ou particuliers, et généralement des professeurs de philosophie ou de rhétorique. On trouvera cette observation constamment vraie depuis le temps de Lysias et d’Isocrate, de Platon et d’Aristote, jusqu’à ceux de Plutar­que et d’Épictète, de Suétone et de Quintilien[1]. Il semble, en effet, que la méthode la plus efficace pour rendre un homme parfaitement maître d’une science particulière, c’est de lui imposer la nécessité d’enseigner cette science régulièrement chaque année. Étant obligé de parcourir tous les ans la même carrière, pour peu qu’il soit bon à quelque chose, il se met nécessairement en peu d’années complètement au fait de chaque partie de sa matière ; et s’il lui arrivait, dans une année, de se former sur quelque point particulier une opinion trop hâtive, quand il vient l’année suivante à repasser sur le même objet dans le cours de ses leçons, il y a à parier qu’il réformera ses idées. Si l’emploi d’enseigner une science est certainement l’emploi naturel de celui qui est purement homme de lettres, c’est aussi peut-être le genre d’éducation le plus propre à en faire un homme vraiment profond en savoir et en connaissances. La médiocrité des bénéfices ecclésiastiques tend naturellement à attirer la plupart des gens de lettres du pays où cette circonstance se rencontre, vers le genre d’emploi dans lequel ils peuvent être le plus utiles au public, et en même temps à leur donner la meilleure éducation peut-être qu’ils soient capables de recevoir ; elle tend à rendre leur savoir aussi solide et aussi profond que possible, et de plus à lui donner la direction la plus utile qu’il puisse prendre. Il est à observer que le revenu de l’Église établie (à l’exception seulement des parties de ce revenu qui peuvent provenir de terres ou de

  1. L’auteur avait ajoute en cet endroit, dans sa première édition, et a retranché dans les éditions postérieures, la phrase suivante : « Plusieurs de ceux sur lesquels nous n’avons pas la certitude qu’ils aient été professeurs publics, ont été, à ce qu’il semble, instituteurs particuliers. Nous savons que Polybe était l’instituteur particulier de Scipiou Émilien, et il y a des raisons assez plausibles de croire que Denis d’Halicarnasse avait rempli les mêmes fonctions auprès des enfants de Marcus et de Quintus Ciréron. »