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l’ouvrier le plus industrieux, mais novice encore en ce métier, veuille s’y livrer, il ne parviendra peut-être à faire en un jour qu’une seule épingle, & sûrement il n’ira pas jusqu’à vingt ; tant les travaux qu’exige une épingle sont divers & multipliés. Il a donc fallu que la nécessité de diviser le travail séparât d’abord ce métier de tous les autres ; qu’elle fît ensuite, de tous les détails qu’il demande, autant de métiers particuliers ; qu’enfin elle créât, pour hâter l’ensemble de l’ouvrage, le jeu & le mouvement des machines : tel est en effet cet art aujourd’hui. Un homme déroule le fil de laiton, celui-ci le redresse, celui-là le coupe, plus loin on l’aiguise en pointe, ailleurs on prépare l’extrémité qui doit recevoir la tête. Pour façonner cette tête, il faut deux ou trois manipulations bien distinctes ; la placer est une occupation nouvelle ; blanchir les épingles en est une autre ; c’est même un métier que de les ranger dans le papier. Enfin, dix-huit opérations forment le grand art de faire une épingle.

Dans plusieurs manufactures, ces dix-huit opérations sont presque toutes exécutées par autant de mains différentes. Cependant j’ai vu une manufacture de ce