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LA CORVÉE

Charles hocha la tête.

— Écoute, Siméon, on en parlait sur le perron de l’église dimanche, et dans le rang de la Petite-Rivière, tout le monde pense comme moi : tu devrais le couper avant qu’il arrive un malheur.

— Le couper !

En disant ces mots le vieillard avait retiré sa pipe et restait là, en arrêt, les yeux agrandis devant cette conjoncture à laquelle il n’avait jamais songé.

— Oui, continua Charles, faudra que tu te décides. J’ai vu un avocat, on peut t’obliger. Mais nous sommes de bons voisins, n’est-ce pas ? Et alors…

Effrayé d’en avoir tant dit, Charles Paradis tourna sur ses talons et rentra chez lui à grands pas, tandis que Siméon, atterré les pieds dans l’herbe, regardait son arbre dont la cime bruissante s’enténébrait peu à peu.

Cette nuit-là, il ne dormit pas. Marie, comme bien l’on pense, avait tout entendu, et le lendemain, ce fut dans la vieille demeure sans enfant comme une menace de mort planant sur un fils unique. L’homme s’endimancha, attela le blond sur la belle voiture, et s’en fut au petit trot vers Québec. Quand il revint vers deux heures de relevée, Marie