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LA CORVÉE

cause du congé que m’a procuré votre lettre, d’abord, et pour avoir le plaisir de vous revoir. Mais puisque corvée il y a, je veux bien en être, si cela peut vous faire plaisir.

Le père allait ajouter quelque chose, mécontent du ton de voix qu’avait pris son fils, mais il n’en eut pas le temps : une voiture venait de s’arrêter à la porte, chargée d’invités, à en juger par le bruit qu’on faisait, et il se contenta d’ajouter :

— Il faut que ces jeunes gens s’amusent et soient bien reçus, André. Tu vas me faire le plaisir de quitter tes airs dédaigneux et d’leur faire les honneurs d’la maison avec Yvonne.

— Tout de même, ne comptez pas sur moi pour les amuser, répondit André, avec dépit. « Je n’en ai ni le goût, ni le courage… »

— Ah ! mon Dieu ! pensa la mère. « On m’a changé mon p’tit ! Et une inquiétude, soudain, la mordit au cœur : « Est-ce que ce beau monsieur-là serait jamais un cultivateur, un habitant ? »

— Bonsoir, m’sieu Servan ! bonsoir madame… Tiens ! bonsoir, André ! T’as pas voulu manquer l’épluchette ?

Une trombe d’invités entraient dans l’immense cuisine où devait se faire la corvée. Les hommes parlaient haut, se serraient les mains avec la phrase consacrée sur les lèvres :