Page:Société agricole et scientifique de la Haute-Loire - Mémoires et procès-verbaux, 1879-1880, Tome 2.djvu/464

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
461
des séances

murs, fut réclamé par la dame Agnès à l’évêque Bernard de Montaigu. L’évêque repoussa, comme un crime, la proposition de livrer le pauvre ménage au châtiment de sa maîtresse. Irritée par ce refus, la fière chatelaine et son jeune fils, Pons, pénétrèrent au Puy, avec leurs hommes d’armes, y saisirent les fugitifs et les immolèrent dans la rue des Grases, au pied de la cathédrale. Bernard de Montaigu tira une prompte vengeance de cet attentat. Il partit pour Chapteuil avec une nombreuse escorte, prit d’assaut la forteresse, y installa une garnison avec des capitaines et réduisit le jeune Pons en captivité. Pendant sept à huit années, le château porta la bannière de l’église du Puy et, durant cette même période, Pons resta détenu dans la cour épiscopale. Le damoiseau essaya maintes fois et en vain d’apaiser le courroux de l’évêque. Toutefois, un beau jour, Bernard de Montaigu se laissa fléchir par les larmes et les supplications de son prisonnier et consentit à lui rendre son patrimoine, mais à cette condition expresse que, si Pons venait à mourir sans enfant mâle, sa terre retournerait à l’église du Puy. Pons se soumit à cette condition. Il fut amené dans son manoir par l’évêque et reçut la restitution solennelle de ses domaines sous la réserve qu’il n’aurait pas d’autre héritier que l’église du Puy, dans le cas où il décéderait sans enfant mâle. Trente ou trente-cinq ans se passèrent. L’union de Pons de Chapteuil et de Marqueze de Goudet fut stérile. Le pacte juré sous les murs de Chapteuil en faveur de l’église du Puy devait donc produire son effet. Infidèle néanmoins à la foi promise, le seigneur de Chapteuil légua ses fiefs au neveu de sa femme, Pons de Goudet, seigneur d’Eynac : il mourut vers 1284 et son légataire institué voulut se mettre en possession. C’est alors que l’évêque Frédol demanda à la justice de consacrer le pacte intervenu entre son prédécesseur, Bernard de Montaigu et feu Pons de Chapteuil. Pons de Goudet résista et se prévalut des dispositions testamentaires de son oncle. Un procès s’engagea alors entre l’église du Puy et le seigneur d’Eynac. Au cours de cette instance, et pendant le mois de juin 1285, une enquête se poursuivit dans notre ville par le ministère de Pierre Silve, juge de Nîmes et délégué de Guérin d’Amplepuis, sénéchal de Beaucaire. C’est cette enquête dont la majeure partie est venue jusqu’à nous qui fournit matière à la communication de M. Rocher.

M. Rocher entre dans de nombreux détails sur l’assassinat des serfs de Chapteuil et sur les conséquences de cette tragique aventure. Il analyse les témoignages et fait ressortir la haute valeur des révélations de toute sorte, émanées de ce beau diplôme qui revoit le jour à la distance de six siècles.

Vivement intéressée par cette communication, l’assemblée décide que l’en-