engager les Chartreux à quitter Bonnefoy et à aller chercher un climat plus hospitalier, un asile plus sûr. Le général de l’ordre, le R. P. Dom Bruno d’Affringues[1], effrayé pour ses religieux, non-seulement donnait les mains à ce transfert de la Chartreuse, mais le sollicitait.
Ce n’était pourtant pas sans difficulté que ce transfert pouvait avoir lieu. Dès 1623, les Chartreux, forts de la protection de Henri de Bourbon, prince de Condé, avaient acquis, aux faubourgs de la ville de Moulins, un emplacement convenable pour un monastère. À la demande du prince, qui avait payé la portion la plus considérable de cette acquisition, Louis XIII avait accordé aux Chartreux des lettres patentes transportant à un nouvel établissement tous les privilèges accordés à celui de Bonnefoy par les rois ses prédécesseurs ; mais dès que l’évêque de Viviers, L.-F. de la Baume de Suze eut connaissance de ce projet, il écrivit « au prieur et à ses religieux leur remontrant que transporter, dans un autre diocèse que celui de Viviers, le service divin, leurs biens et leur rentes sous le prétexte des persécutions et pillage des huguenots, ce serait méconnaître les volontés des fondateurs et des bienfaiteurs qui ne leur avaient donné ces grands biens que pour qu’ils fissent le service divin dans ce diocèse et non ailleurs, leur déclarant que, s’ils persistaient. il s’y opposerait formellement[2] ».
Pendant que se poursuivaient ces négociations, une autre combinaison se présenta aux Chartreux : c’était de transporter leur couvent aux portes du Puy. Ils pouvaient compter dans cette ville sur l’appui puissant de l’évêque Just de Serres et de son beau-frère Guillaume de Bertrand, juge-mage et lieutenant-général en la sénéchaussée du Puy. Pour engager encore plus avant le juge-mage dans leurs intérêts, les Chartreux lui vendirent le 18 novembre 1624, la terre et seigneurie du Mezenc[3].