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tère de froide énergie et de sombre exaltation. Tout ce que le moyen âge contenait de libres allures, d’initiative et parfois d’indiscipline, s’était condensé dans ces âmes simples et profondes, où vivaient sans partage deux ou trois de ces principes qui sont l’aliment des sociétés humaines. De là vint cette persistance du moyen âge à vivre et à se perpétuer sur notre sol au-delà des limites que partout ailleurs les lois historiques tracèrent à son essor.

On peut apprécier diversement la Ligue, on l’aime ou on la maudit, suivant le point de vue auquel on se place ; mais il est difficile de n’y pas voir l’une des plus énergiques explosions de la conscience, le superbe réveil de cette foi ardente dont le moyen âge fit sa vie et sa lumière. La Ligue en Velay mit au jour d’héroïques exemples d’abnégation et d’intrépidité, que notre âge est peut-être inhabile à comprendre. Souffrir et mourir pour un principe, ne compter pour rien les aises, le bien-être et même l’existence, se refuser aux plus évidentes nécessités de la politique, abdiquer tout souci personnel, telle fut la conduite de nos fidèles populations, et, quel que soit le drapeau que l’on suive, c’est là un spectacle qui s’impose à l’admiration respectueuse, en dépit des excès et des fureurs dont ces luttes intestines subirent trop souvent la souillure. Ce qui donne à la Ligue, dans nos parages, ce caractère d’opiniâtreté intense et de vitalité profonde, c’est précisément le goût du self-governement dont notre moyen âge avait gardé le dépôt. Les ligueurs vellaves avaient conservé à peu près intactes les passions de leurs devanciers : leurs franchises consulaires offrirent un libre cours à l’expression armée de leurs convictions religieuses. En un mot, la Ligue se résume chez nous en ces deux termes : amour jaloux, exclusif de la vieille foi, et fièvre aiguë d’autonomie locale ; ce qui se réduit à cette formule plus concrète : persistance du moyen âge jusqu’aux confins du XVIIe siècle.

La Ligue en notre province a déjà fourni la matière d’un beau livre : les récits de M. Louis de Vinols sont une œuvre classique, mais nos guerres religieuses offrent encore un vaste champ