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Page:Soloviev - Trois entretiens sur la guerre, la morale et la religion, trad Tavernier, 1916.djvu/243

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où se promènent leurs enfants ? Comment a été perdue Dounia ? Je vous le demande.

LE GÉNÉRAL. – C’est exact ! Si Delarue avait passablement serré le cou du scélérat à la porte de la maison, celui-ci ne serait pas monté à l’entresol.

M. Z… – En effet. Admettons que Delarue fût libre de se sacrifier à sa bonté, comme jadis il y avait des martyrs de la foi et comme, maintenant, il doit y avoir des martyrs de la bonté. Mais à l’égard de Dounia, que faire ? je vous le demande. Vous le voyez, elle est sotte et jeune ; elle ne peut ni ne désire rien dénoncer. N’est-elle pas à plaindre ?

L’HOMME POLITIQUE. – Admettons qu’elle est à plaindre. Mais ce que je regrette davantage, c’est que, apparemment, l’Antéchrist nous a quittés avec le scélérat, pour courir à Tambov.

M. Z… – Nous le rattraperons, Excellence, nous le rattraperons. Hier, vous avez bien voulu nous montrer, par l’histoire, que l’humanité naturelle, – composée primitivement d’une multitude de nations plus ou moins sauvages, en partie étrangères et en partie hostiles l’une à l’autre, – développe graduellement la meilleure portion d’elle-même, la portion civilisée – le monde cultivé ou européen qui, graduellement, prend de l’ampleur et de la consistance et qui, enfin, doit embrasser dans ce mouvement historique toutes les nations retardataires et former avec elles un ensemble solidaire, pacifique et international. L’institution de la paix internationale perpétuelle – voilà, n’est-ce pas, votre formule ?

L’HOMME POLITIQUE. – Oui, et cette formule, dans