Page:Solvay - La Fanfare du cœur, 1888.djvu/13

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croirais bien même que, tout au contraire, cela y aide considérablement. C’est ce qui advint à Durasoir. Le petit Gontran, que vous connaissez bien, je suppose…

— Parfaitement ! Un charmant garçon.

— Un sot, vous dis-je. Pas si sot pourtant qu’il ne sut accaparer le cœur de Mme  Durasoir et l’amitié du mari, tout ensemble.

— Ceci aide cela.

— Hélas !… Depuis combien de temps la liaison durait, je ne saurais trop vous dire. Gontran étant si modeste, si réservé, si timide ! Qui s’en serait méfié ? On lui aurait donné le bon Dieu sans confession… Naturellement, dans ces conditions là, Durasoir fut ce que tout mari, à sa place, est habituellement, — avant d’être plus, — aveugle…

— Et sourd.

— Comme vous dites. Il ne voyait pas les œillades, les serrements de main à la dérobée, les regards d’intelligence ; il n’entendait pas les chuchotements quand il tournait les talons, la tendresse du parler mal dissimulée derrière une apparente froideur, que sais je encore ?… Quant au… reste, il s’en douta moins encore.

— Mais c’était une bête, votre ami Durasoir ?

— Une bête, une bête !… J’aurais voulu vous y voir, vous.

— Grand merci !… Et pas le moindre soupçon ? Rien ?…

— Oh ! des soupçons, les maris en ont toujours, mais ils n’y croient jamais. Ils ne veulent pas y croire. Durasoir en eut, comme en ont tous ses semblables, et, comme tous ses semblables aussi, ils ne firent que le rendre plus aveugle et plus sourd…

III

Pardon si je vous interromps, dit Eustache en frappant légèrement sur le bras du major, mais je ne vois pas du tout ce qu’il y a de commun entre le cas de votre ami et les merveilles de la science dont nous parlions tout à l’heure.

— Patience ! répondit Fourrazine. J’y arrivais précisément.

— J’écoute.

— Un beau jour, — jour fatal ! — tout cet édifice de cachoteries et d’hypocrisie s’écroula d’un seul coup. Voici comment. Il n’y a pas bien longtemps de cela. Des fêtes avaient été organisées par la ville en l’honneur de la prin-