Aller au contenu

Page:Sonnerat - Voyage aux Indes orientales et à la Chine, tome 2.djvu/53

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
27
ET A LA CHINE. Liv. IV.

mie, de même que les terreurs singulières qu’ils éprouvent à l’approche des éclipses ? Quand elles sont annoncées, on les affiche trois jours avant qu’elles n’arrivent, & il est enjoint à tous les Chinois de prier le Poussa pour que l'Ammé-Paoâ, qui signifie Crapaud à trois pattes, n’avale pas le Soleil

Ils ne font pas mieux instruits en Géographie. La terre, selon eux, est de forme quarrée, & leur Empire est dans le centre : la Marine est encore une science dont ils ne se doutent point ; ils attribuent le flux & le reflux à un gros poisson qui siége au fond de la mer : dans les tempêtes, quand le danger exigeroit la manœuvre la plus prompte, ils adressent leurs prières à la boussole, & périssent avec l’objet de leur adoration.

Leurs vaisseaux ou sommes, sont des machines énormes. Il y en a qui portent jusqu’à mille tonneaux. Les deux extrémités sont prodigieusement élevées, & présentent au vent une surface considérable. Il en périt plus de la moitié, parce qu’une fois sur le côté, ils ne peuvent plus se relever. Leurs ancres sont de bois, leurs voiles de nattes, & leurs câbles de rotins.

Ils ne connoissent point les instrumens avec lesquels nous prenons hauteur. Ceux qui vont au Japon ou aux Philippines, se dirigent par les astres, comme feroit le Sauvage le plus grossier, & ceux qui font route vers Batavia, Malacca ou Quéda, ne quittent jamais la terre de vue : telles sont leurs connoissances en marine. Cependant ils ont fait autrefois le commerce de l’Inde. Ils alloient à la côte de Coromandel, & même jusqu’au fond du golfe de Bengale. On voit encore à Negapatnam les ruines d’une tour Chinoise ; mais il est faux qu’ils aient jamais entrepris d’envoyer en Europe une escadre de six cens bâtimens, comme l’ont avancé plusieurs Jésuites,