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Page:Sophocle, trad. Leconte de Lisle, 1877.djvu/228

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lerai à aucun de ceux-ci, ni même à mes filles, bien que je les aime. Sache-la, seul ; et, quand tu seras parvenu à la fin de ta vie, confie ce secret à ton seul héritier, et que celui-ci le confie à qui commandera après lui ! Tu rendras ainsi ta ville inexpugnable aux Thèbaiens. De nombreuses villes, même bien régies, ont été entraînées à l’iniquité. Les Dieux, tôt ou tard, découvrent celui qui, plein de démence, méprise les choses divines. Ô fils d’Aigeus, ne sois jamais tel. Mais je t’enseigne ce que tu sais. Le Dieu me presse de me rendre à l’endroit voulu. Ne tardons pas plus longtemps. Suivez-moi, ô enfants. Guide extraordinaire, je vous mène à mon tour comme vous avez conduit votre père. Marchez et ne me touchez pas. Laissez-moi trouver seul le tombeau sacré où il est fatal que je sois enfermé dans cette terre. Ici ! là ! par ici ! Hermès conducteur me mène, et la Déesse souterraine. Ô sombre lumière, qui étais à moi autrefois, tu touches pour la dernière fois mon corps ! Je vais enfermer dans le Hadès ce qui reste de ma vie. Ô le plus cher des hôtes, ô terre, ô serviteurs du chef, soyez heureux ! Et du milieu de vos félicités sans fin, souvenez-vous de moi qui serai mort !

LE CHŒUR.
Strophe.

S’il m’est permis de supplier la Déesse invisible, ainsi que toi, Aidoneus, Aidoneus, roi des Nocturnes ! Je vous demande que l’Étranger n’arrive point par une mort difficile et triste aux Campagnes souterraines des morts, à la demeure Stygienne où tous sont enfermés. Ayant été accablé par tant de maux non mérités, il serait juste que le Daimôn lui vînt en aide.