Créon. — Parler beaucoup et parler à propos font deux.
Œdipe. — Alors, toi, tu parles peu et tu parles à propos ?
Créon. — Ce n’est assurément pas ce que pense qui a l’esprit fait comme le tien.
Œdipe. — Sors d’ici, je te l’ordonne au nom de ces Colonialts, cesse de m’observer, de m’épier en ce lieu où je dois désormais demeurer.
Créon. — J’en appelle à eux, et non à toi. Quant aux réponses que tu fais à tes amis, si je te prends jamais[1]…
Œdipe. — Qui oserait méprendre, malgré mes défenseurs ?
Créon. — A coup sûr, même sans cela tu seras puni.
Œdipe. — De quel acte accompagnes-tu ta menace ?
Créon. — De tes deux filles j’ai déjà pris et enlevé l’une ; l’autre je l’emmènerai bientôt.
Œdipe. — Oh ! dieux !
Créon. — Bientôt tu auras encore plus de raison de les invoquer.
Œdipe. — Ma fille, elle est entre tes mains ?
Créon. — Et l’autre, je l’aurai avant qu’il soit longtemps.
Œdipe. — Mes hôtes, qu’allez-vous faire ? Me trahirez-vous ? Ne chasserez-vous pas cet impie de votre sol ?
Le Coryphée. — Va-t-en, étranger, éloigne-toi vite. Ce que tu veux faire en ce moment, ce que tu as accompli est un crime.
Créon. — (Aux gardes qui l’accompagnent.) Voici le moment d’emmener cette jeune fille par la force, si elle ne consent pas de bon gré à vous suivre.
Antigone. — (Elle essaie d’échapper aux gens qui l’entourent.) Ah ! malheureuse, où fuir ? Quel secours puis-je attendre des dieux ou des hommes ?
Le Coryphée. — (Il s’interpose, menaçant.) Que fais-tu, étranger ?
- ↑ Il complétait sa pensée avec un geste de menace.
seul (cf. O. R. 151) et Apollon, en maint endroit, est représenté comme le prophète du dieu suprême. (Cf. Hymne à Apollon Délien, v. 132.)