mais sache que ta sûreté est certaine, tant qu’à la mienne y pourvoira un dieu.
Le Chœur[1]. — Quiconque souhaite une longue existence et dédaigne la mesure de vie ordinaire, me paraît un véritable insensé. Le plus souvent ce que les nombreux jours nous amènent, ressemble plus à de la tristesse qu’à du bonheur ; la joie, on ne la découvre plus nulle part, quand on a eu le malheur de dépasser le terme nécessaire, et le remède qui nous est réservé à tous, lorsque surgit, sans être accompagnée de chants d’hymen, de lyres, de chœurs, la Parque de l’Hadès, c’est la mort, pour finir.
Ne pas naître est le sort qui surpasse tous les autres, et celui qui de beaucoup s’en rapproche le plus, c’est aussitôt qu’on a paru à la lumière, de retourner d’où l’on vient, au plus vite. Quand on a dépassé la jeunesse, qui n’apporte avec soi que folies vaines, qui parvient jamais, courbé sous l’affliction, à s’en délivrer ? Quels maux nous sont épargnés ? Jalousie, querelles, discorde, luttes et meurtres. Puis vient,
- ↑ Les Coloniates, vieillards eux-mêmes, déplorent le malheur de vieillir et même de vivre. Leurs plaintes sont inspirées par les infortunes d’Œdipe et sa mésintelligence avec ses fils. Ce thème général a souvent été développé dans la littérature grecque, depuis Homère, Mimnerme et Théognis, mais on croirait entendre ici Sophocle parler de lui-même. Y a-t-il, en ces vers désenchantés, un souvenir personnel des querelles qui auraient troublé son foyer dans les dernières années de sa vie, ou bien au contraire ces querelles auraient-elles été imaginées d’après ces vers ? Personne ne le sait plus aujourd’hui. Remarquons seulement qu’aucun témoignage contemporain ne les atteste, qu’Aristophane (Grenouilles, 82) et Phrynichos (cf. vol. I,
appel à sa générosité : il a reçu l’hospitalité de Thésée, il faut qu’il cède à sa prière, qu’il écoute son fils. — Antigone a toujours cette âme fraternelle que Goethe a si bien définie, mais sans rien perdre de son abnégation et de son dévouement, elle est devenue infiniment plus adroite. N’oublions pas, en effet, qu’en 401 le λόγος est si puissant qu’un homme comme Thésée ne peut lui-même régner sur Athènes que s’il y est passé maître. (Cf. v. 68.)