Une telle fureur ?... Je voudrais te parler
T’interroger, te voir... Tout me fait reculer
D’épouvante et d’effroi !...
Moi, l’homme du malheur, d’une marche incertaine
Où me traîner ? Où vais-je ? Et dans quels lieux ma voix
Hélas ! gémira-t-elle ? O toi que tant de fois
J’ai maudit, ô destin ! où plongeas-tu ma vie ?
O nuage éternel qui me ravis le jour !
État cruel, affreux, ténèbres exécrables,
Hélas ! vous punissez des maux irréparables !
Hélas ! cent fois hélas ! que de remords rongeurs
Réveillent à la fois mes maux et mes douleurs,
Plus que l’aiguillon d’or qui m’arracha la vue !
De plus, tu sens tes maux ; tu te plains justement,
Œdipe, d’être en proie à ce double tourment[1].
Vous ne me quittez point, privé de la lumière !
Quoique mes yeux au jour soient à jamais fermés,
Je connais votre voix ; mes enfants bien-aimés,
Votre pitié me touche.
Quel Dieu cruel sur toi dirigea sa furie ?
- ↑ Sophocle dit : O prince doublement infortuné, et par tes malheurs, et par le sentiment que tu en as !