Verront-ils sans pitié finir nos tristes jours ?
Ces maîtres des humains sont-ils muets et sourds ?
Le meurtrier du roi respire en ces États,
Et de son souffle impur infecte vos climats.
Il faut qu’on le connaisse, il faut qu’on le punisse ;
Peuple, votre salut dépend de son supplice.
D’un crime inexcusable un rude châtiment.
Laïus vous était cher, et votre négligence
De ses mânes sacrés a trahi la vengeance…
Aussi du ciel vengeur implorant le courroux,
Le sang de votre roi s’élève contre vous.
Apaisons son murmure, et qu’au lieu d’hécatombe,
Le sang du meurtrier soit versé sur sa tombe.
Quoi ! de la mort du roi n’a-t-on pas des témoins ?
À chercher le coupable appliquons tous nos soins.
Et n’a-t-on jamais pu, parmi tant de prodiges,
De ce crime impuni retrouver les vestiges ?
On m’avait toujours dit que ce fut un Thébain
Qui leva sur son prince une coupable main.
À ses seules fureurs Thèbes fut attentive ;
Et l’on ne pouvait guère, en un pareil effroi,
Venger la mort d’autrui, quand on tremblait pour soi.
J’ai tout mon peuple ensemble et Laïus à venger.
Il faut tout écouter ; il faut d’un œil sévère
Souder la profondeur de ce triste mystère.
Et vous, Dieux des Thébains, Dieux qui nous exaucez,
Punissez l’assassin, vous qui le connaissez !
Soleil, cache à ses yeux le jour qui nous éclaire !
Qu’en horreur à ses fils, exécrable a sa mère,
Errant, abandonné, proscrit dans l’univers,
Il rassemble sur lui tous les maux des enfers ;
Et que son corps sanglant, privé de sépulture,
Des vautours dévorants devienne la pâture !
Suspendent-ils en fin leur fureur vengeresse ?
Quelle main parricide a pu les offenser ?
Qu’aux mortels curieux vous êtes dangereuse !
Plût aux cruels destins qui pour moi sont ouverts,
Que d’un voile éternel mes yeux fussent couverts !
Le salut des Thébains dépend de sa réponse.