Page:Sophocle - Tragédies, trad. Artaud, 1859.djvu/389

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NÉOPTOLÈME.

Et, quel pouvait être celui qu’Ulysse allait chercher lui-même ?

LE MARCHAND.

C’était.... Mais dis-moi d’abord quel est cet homme, et ta réponse, ne la fais qu’à voix basse.

NÉOPTOLÈME.

C’est l’illustre Philoctète que tu vois, étranger.

LE MARCHAND.

Ne me fais plus d’autres questions, mais embarque-toi au plus vite, et hâte-toi de fuir[1] loin de ces bords.

PHILOCTÈTE.

Que dit-il, mon fils ? Qu’a donc ce marin à trafiquer[2] de moi dans l’ombre, en paroles échangées avec toi ?

NÉOPTOLÈME.

Je ne sais pas encore ce qu’il veut m’apprendre, mais ce qu’il dira il faut qu’il le dise à la clarté du jour, à toi, à moi, et à ceux-ci.

LE MARCHAND.

O fils d’Achille, ne me compromets pas auprès de l’armée, comme un homme qui révèle ce qu’il faut taire ; ils me récompensent trop bien des faibles services que peut leur rendre un homme pauvre comme moi.

NÉOPTOLÈME.

Pour moi, je suis l’ennemi des Atrides, et cet homme a toute mon amitié, parce qu’il les déteste. Si donc tu es venu en ami, il faut que tu ne nous caches rien de ce que tu as entendu dire.

  1. Σεαυτὸν ξυλλαβών : ce verbe exprime l’empressement, la précipitation, comme en latin de corripere, abripere. Plaute, Mercat. 4 : « Ut corripuit se repente, atque abiit. » Curculio, 599 : « Foras me abripui atque effugi. »
    Térence, Hecyr. III, sc. 3, 5 : « Intro me corripui timidus. »
    Virgile, parlant de Didon aux enfers (Én. VI, 472) : « Corripuit sese... »
  2. Διεμπολᾷ, il vend, dans le sens de il trahit. - Plus bas, v. 977, Philoctète dit de même, πέπραμαι. Plaute, dans les 'Bacchides, vers 717 :
    O stulte, stulto, nescis nunc venire te
    Atque in eo ipso adstas lapide ubi præco prædicat.
    — Responde : quis me vendit ?