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Page:Sorel - L’Histoire comique de Francion, 1925.djvu/34

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auparavant appris qu’il y avait beaucoup de riches meubles dedans ce château dont Valentin était le concierge, s’étaient résolus de le piller et, pour y parvenir, avaient fait vêtir en fille le plus jeune d’entre eux, qui était assez beau garçon, lui conseillant de chercher le moyen d’y demeurer quelque temps pour remarquer les lieux où tout était enfermé, et pour tâcher d’en avoir les clefs, afin qu’ils pussent ravir ce qu’ils voudraient.

Ce voleur, prenant le nom de Catherine, était donc entré il y avait plus de huit jours chez Valentin pour lui demander l’aumône, et lui avait fait accroire qu’il était une pauvre fille dont le père avait été pendu pour des crimes faussement imposés, et qu’elle n’avait pas voulu demeurer en son pays à cause que cela l’avait rendue comme infâme. Valentin, étant touché de pitié au récit des infortunes controuvées de cette Catherine, et voyant qu’elle s’offrait à le servir sans demander des gages, l’avait retirée volontiers dedans sa maison. Ses services complaisants et sa façon modeste, qu’elle savait bien garder en tout temps, lui avaient déjà acquis de telle sorte la bienveillance de sa maîtresse, qu’elle avait eu d’elle la charge du maniement de tout le ménage. On se fiait tant en elle, qu’elle avait beau prendre les clefs de quelque chambre, voire les garder longtemps, sans que l’on craignît qu’elle fît tort de quelque chose et que l’on les lui redemandât.

Le jour précédent, en allant à l’eau à une fontaine hors du village, elle avait rencontré un de ses compagnons qui venait pour savoir de ses nouvelles, pendant que les autres étaient à un bourg prochain, en attendant l’occa-