Page:Sorel - Montesquieu, 1887.djvu/111

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dois vouloir. Les actes qui opprimaient les catholiques et les dissidents anglais, étaient des lois. On jouissait de la liberté de conscience dans les États du grand Frédéric, où le roi régnait sans contrôle ; on n'en jouissait pas en Angleterre, où il y avait un Parlement et des ministres responsables.

Où donc se trouve la liberté ? « La liberté politique ne se trouve que dans les gouvernements modérés. Mais elle n’est pas toujours dans les États modérés ; elle n’y est que lorsqu’on n’abuse pas du pouvoir… Pour qu’on ne puisse abuser du pouvoir, il faut que, par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir. »

C’est la théorie fameuse de la séparation des pouvoirs. Montesquieu la résume en ces termes : « Lorsque, dans la même personne ou dans le même corps de magistrature, la puissance législative est réunie à la puissance exécutrice, il n’y a point de liberté, parce qu’on peut craindre que le même monarque ou le même sénat ne fasse des lois tyranniques pour les exécuter tyranniquement. » On l’a vu, en France, sous le régime de la monarchie pure et sous celui des assemblées. La révocation de l’Édit de Nantes, la loi des suspects et la loi des otages en donnent la preuve. Il faut donc que l’exécutif et le législatif soient séparés ; mais, si cela est nécessaire pour garantir la liberté, cela n’y suffit point. « Il n’y a point encore de liberté si la puissance de juger n’est pas séparée de la puissance législative et de l’exécutrice. Si elle était jointe à