Page:Sorel - Montesquieu, 1887.djvu/174

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lution française, commence par une maxime qui est le fond de l'histoire de France selon l'Esprit des lois : « C’est la liberté qui est ancienne et le despotisme qui est moderne. » Écrivant l’histoire de la liberté de 1789 à 1814, Mme  de Staël fait, pour ainsi dire, l’histoire des idées de Montesquieu à travers la Révolution et l’Empire.

La branche monarchique des fils de Montesquieu avait atteint sa plus haute fortune avec la Restauration. Elle avait fondé ce gouvernement ; elle aurait été seule capable de le maintenir en le ramenant constamment à son principe : elle n’y réussit point. Ces politiques modérés ne parvinrent pas à faire comprendre aux théocrates de la monarchie restaurée que le mot abstrait de légitimité ne signifie rien en soi ; que le droit qu’on en prétend déduire est un simple droit de prescription, que, pour n’être point rompue, cette prescription doit être toujours renouvelée ; que c’est « dans la suite des temps et par le consentement du peuple » que les gouvernements nouveaux se légitiment selon Bossuet, et que les anciens se soutiennent selon Montesquieu. « Le gouvernement le plus conforme à la nature, avait-il dit, est celui dont la disposition particulière répond le mieux à la disposition du peuple pour lequel il est établi. »

Les disciples royalistes de Montesquieu tombèrent du pouvoir avec la monarchie constitutionnelle. La France eut, une fois de plus, à choisir entre « l’État populaire et l’État despotique. » La démocratie s’y