Page:Sorel - Réflexions sur la violence.djvu/369

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C. — Il n’y aurait jamais de grandes prouesses à la guerre, si chaque soldat, tout en se conduisant comme une individualité héroïque, prétendait recevoir une récompense proportionnée à son mérite. Quand on lance une colonne d’assaut, les hommes qui marchent en tête savent qu’ils sont envoyés à la mort et que la gloire sera pour ceux qui, montant sur leurs cadavres, entreront dans la place ennemie ; cependant ils ne réfléchissent point sur cette grande injustice et ils vont en avant.

Lorsque dans une armée le besoin de récompenses se fait très vivement sentir, on peut affirmer que sa valeur est en baisse. Des officiers qui avaient fait les campagnes de la Révolution et de l’Empire, mais qui ne servirent sous les ordres directs de Napoléon que durant les dernières années de leur carrière, furent très étonnés de voir mener grand tapage autour de faits d’armes qui, au temps de leur jeunesse, fussent passés inaperçus : « J’ai été comblé d’éloges, disait le général Duhesme, pour des choses qui n’eussent pas été remarquées à l’armée de Sambre-et-Meuse[1]. » Le cabotinage était poussé par Murat jusqu’au grotesque, et les historiens n’ont pas assez remarqué quelle responsabilité

    Contrat de travail à expliquer les raisons qui justifient le boycottage des ouvriers qui ne suivent pas leurs camarades dans les grèves ; il estime que ces gens mérilent leur sort parce qu’ils sont d’une valeur professionnelle et morale notoirement inférieure. Cela me semble fort insuffisant pour rendre compte des raisons qui, aux yeux des masses ouvrières, expliquent ces violences.

  1. Lafaille, Mémoires sur les campagnes de Catalogne de 1808 à 1814, p. 336.