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Page:Sorel - Réflexions sur la violence.djvu/88

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accord se ferait si une meilleure éducation sociale était donnée aux citoyens.


Voyons sous quelles influences se produit l’autre mouvement qui tend à rendre les conflits plus aigus.

Les ouvriers se rendent facilement compte que le travail de conciliation ou d’arbitrage ne repose sur aucune base économico-juridique et leur tactique a été conduite — instinctivement peut-être — en conséquence. Puisque les sentiments et surtout l’amour-propre des pacificateurs sont en jeu, il convient de frapper fortement leurs imaginations et de leur donner l’idée qu’ils ont à accomplir une besogne de Titans ; on accumulera donc les demandes, on fixera les chiffres un peu au hasard, et on ne craindra pas de les exagérer ; souvent le succès de la grève dépendra de l’habileté avec laquelle un syndiqué (qui comprend bien l’esprit de la « diplomatie sociale ») aura su introduire des réclamations fort accessoires en elles-mêmes, mais capables de donner l’impression que les entrepreneurs d’industrie ne remplissent pas leur devoir social. Bien des fois les écrivains qui s’occupent de ces questions s’étonnent qu’il se passe plusieurs jours avant que les grévistes soient parfaitement fixés sur ce qu’ils doivent réclamer, et que l’on voie à la fin apparaître des demandes dont il n’avait jamais été question au cours des pourparlers antérieurs. Cela s’explique sans difficulté lorsqu’on réfléchit aux conditions bizarres dans lesquelles se fait la discussion entre les intéressés. Je suis surpris qu’il n’y ait pas de professionnels des grèves, qui se chargeraient de dresser les tableaux des revendications ouvrières ; ils obtiendraient d’autant