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le vampire.

puyer contre la muraille. Le moindre choc l’eût renversée. Ses oreilles tintaient, sa poitrine brûlait, et une douleur poignante lui labourait le cerveau. Enfin, elle atteignit la porte d’une boutique.

Le marchand atteint d’une de ces faces grasses et rondes, annonçant que la folle du logis est inconnue, se prélassait sur une banquette recouverte de velours rougeâtre et constellée de clous dédorés.

— Que vous faut-il, ma belle enfant ?…

— Je voudrais un pain. Articula faiblement la malheureuse affamée.

— Ah ! mademoiselle est Anglaise ; je connais cela à l’accent. En voici un, mademoiselle, frais comme votre visage et chaud aussi peut-être comme votre cœur, eh ! eh !… Faut-il vous le peser ?

— C’est inutile. Et, ce disant, Ophélia déposait sa pièce de monnaie sur le comptoir.

Le boulanger regarda cette pièce attentivement et la laissa tomber deux ou trois fois sur le marbre, où elle rendit un son sourd et mat. Malgré toute sa galanterie, le boutiquier ne plaisantait pas avec les écus de cent sous.

— Qu’est-ce que vous me donnez là, mademoiselle.

— Mais, cinq francs.

— Cinq francs, cela !… Diable, ce n’est cependant pas la chaleur qui peut l’avoir ramolli de la sorte, cet argent.

Et, avec quatre de ces gros doigts il plia la pièce en deux.

— C’est du plomb, ma belle enfant ; je ne sais si on vous a trompée, et vous devez me remercier si je ne fais pas vérifier le fait par un commissaire de police. Mais, ce sont de ces affaires dans lesquelles je n’aime pas à