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le vampire.

cautions, sans danger, traversa le vallon de Sainte-Adresse, puis gravit la côte d’Ingouville.

C’était le matin, la côte était déserte.

Le jeune homme ayant marché beaucoup dans des sentiers pénibles, la fatigue physique prédomina. Il s’assit sur un banc de bois sous de grands hêtres. En face, le paysage offrait toutes ses richesses pour distraire sa pensée. L’embouchure de la Seine s’enfonçait jusqu’aux côtes bleues de la Basse-Normandie. C’était l’heure de la haute mer. Le Hâvre, grand comme un mouchoir, répandait par le goulet étroit de son avant-port des vaisseaux et des steamers qui couvraient la mer jusqu’aux derniers horizons, jusqu’au ciel. Mais Robert ne daignait seulement pas accorder un regard sur ce tableau étendu à ses pieds. — Il faut être bien vertueux pour s’inquiéter d’un paysage, tout aussi bien que pour voir lever l’aurore !…

Une voiture passa devant lui. Il ne leva pas les yeux. À l’extrémité de la côte, les chevaux s’arrêtèrent, et un homme mit pied à terre. Il regarda un moment la mer où couraient de grandes ombres de nuages, puis revint sur ses pas vers le lieu où rêvait le jeune homme

Il s’assit sur le même banc que lui.

Cette présence contraria sans doute de Rolleboise, car il promena comme par contenance ses yeux sur la rade ; mais il ne regarda pas l’étranger.

Cependant cet homme ne lui était pas inconnu. — C’était Horatio Mackinguss.

— Jeune homme triste, amour malheureux.

Robert se retourna, reconnut l’Anglais et ne le salua pas.

— Si je ne me trompe, continua Horatio, vous avez