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Page:Soulié - Les Mémoires du Diable, 1838, tome I.djvu/229

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À cette phrase, toute l’âme de Luizzi tressaillit ; une pitié profonde et un remords désolé le remuèrent jusque dans ses entrailles. Sa pensée lui parut une torture ajoutée à l’incessante torture de cette malheureuse. Oh ! quel effroyable supplice infligé à cette âme obligée de verser de chastes pleurs entre ces lignes de boue, et de faire monter sa prière à Dieu entre les blasphèmes débauchés de ces pages dégoûtantes ! La voyez-vous forcée de tenir son œil tendu sur le mot, sur la lettre qui traduit son désespoir, sous peine de rencontrer à côté un mot hideux, infâme, turpide ? Oh ! comment cette blanche hermine a-t-elle traversé, dans son long et étroit dédale, ce bourbier fangeux ? Comment ce papier si sale de ce que la main d’un misérable y a imprimé est-il coupé de lignes pures et douces où s’est posée timidement l’âme d’une infortunée ? Et, pour qu’elle n’ait pas effacé cette vie souillée dont le récit marche à côté de sa vie malheureuse, elle n’a eu qu’une raison : son sang est devenu trop rare. Ô malheureuse ! malheureuse !