Et du Bergh embrassa Nathalie. Il était à moitié ivre, elle recula d’horreur et de dégoût. Du Bergh se mit en devoir de fermer les contrevents et les rideaux, en marmottant :
« — Ah ! vieux Firion, tu voulais me faire tuer médico-légalement, mon doux père… Nous verrons… nous verrons…
Nathalie s’élança pour sortir.
« — Que nenni, ma colombe ! dit du Bergh en l’arrêtant.
« — Monsieur, je vais appeler.
« — Pourquoi ? pour dire que vous êtes désolée que votre mari adoré ne soit pas mort ?… Ô bon père ! ta fille est digne de toi !… »
Ce mot passa comme une lueur infernale devant Nathalie ; cependant elle frissonna en détournant la tête comme pour ne pas la voir.
« — Monsieur, dit-elle à du Bergh, il faut nous séparer.
« — Plaît-il ? Et pourquoi ?
« — Parce que nous ne pouvons vivre ensemble.
« — C’est précisément le contraire que j’espère.
« — Jamais.
« — Il y a des lois qui assurent les femmes à leurs maris.
« — Eh bien ! Monsieur, partons, fuyons la France…
« — Mon enfant, dit du Bergh d’un ton outrageusement paternel, tout ce qui vous arrive vous a un peu bouleversé la tête. Nous partirons demain pour Paris. Je suis bon homme au fond ; et, pourvu que le beau-père nous assure deux ou trois cent mille livres de rente, un hôtel, un château, etc., je le respecterai et ne lui parlerai même pas de ses projets à mon égard.
« — Est-ce donc un parti pris ?
« — Parfaitement pris. Songez donc, Nathalie, que voilà deux mois je ne rêve pas autre chose. Allons, enfant, la nuit avance… Ma Nathalie, m’aimes-tu ?… Viens.
« — Tout à l’heure, répondit Nathalie d’un air presque tendre.
« — Que fais-tu là ?
« — Rien… c’est une habitude que j’ai… Je renferme mes boucles d’oreilles dans ce secrétaire.
« — Avec son mari, on n’a plus peur des voleurs…
« — Sans doute, dit Nathalie en souriant et en présentant son front à du Bergh, tandis que sa main prenait dans le secrétaire un flacon imperceptible.
« — À la bonne heure, cher cœur, dit du Bergh voilà comme je t’aime. Et il porta la main sur le blanc fichu de Nathalie.
« — Oh ! lui dit-elle, regarde si personne n’est à cette porte…
« — Enfant !
« — Je t’en prie ! »
Il alla vers la porte, l’entr’ouvrit, et revint vers Nathalie. Elle était près de la table, pâle et tremblante…
« — Qu’as-tu ?
« — Je souffre, je voudrais un verre d’eau.
« — Prends ce verre de vin de Bordeaux, il te remettra.
« — Le vin