Page:Soumet - La Divine Épopée, 1841.djvu/107

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O prodige ! à présent s’affaiblit par degrés ;
Ses pieds sur les lys blancs marchent décolorés,
Reprenant, pas à pas, tout embaumés de myrrhe,
Les signes effacés, stigmates du martyre,
Il monte vers le père, et cependant son œil
Semble, bien loin de lui, regarder un cercueil ;
Et se mouiller encor de ces pleurs, sainte pluie
Qui tombait sur Lazare, en lui versant la vie.
Mystère impénétrable ! évangéliques pleurs !
Le Dieu de gloire monte en homme de douleurs ;
Et même l’on croit voir, formidable présage,
Flotter autour de lui comme un vague nuage,
Cette robe de lin qui fut jetée au sort
Sur la triste montagne, en présence du mort.
Et, lorsqu’il va franchir le seuil du sanctuaire,
Comme pour compléter l’appareil du calvaire
On croit voir un fardeau, croix immense de feu,
Surcharger et brûler les épaules du Dieu.
On croit voir, figurant le terrestre supplice,
Passer devant sa lèvre une ombre de calice ;
Et du bandeau royal, toujours plus pâlissant,
Les perles de clarté fuir en gouttes de sang ;
Ou former sur son front, comme à l’heure suprême,
En rayons épineux, le souffrant diadème :
Transfiguration plus étonnante encor,
Que celle dont l’éclat foudroya le Thabor !

Mais ce grand souvenir emprunté de la terre,
Nul des esprits créés n’en comprit le mystère.
Nul d’entre eux n’entendit la voix de Jéhova,
Qui s’adressait au Christ et qui lui disait : .. « Va !
« Tu veux, mon fils, tu veux dans leur nuit inféconde