Page:Soumet - La Divine Épopée, 1841.djvu/182

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De science, mon maître étendait ses leçons
Par delà notre globe à l’étroite surface.
Avec les noirs esprits nous vivions face à face ;
Dans cette nuit sinistre à l’oblique chemin
Nous entrions tous deux, nous tenant par la main ;
Et souvent égarés sous l’invisible voûte,
Au.vieillard indécis l’enfant montrait la route ;
L’élève rassurait le maître épouvanté :
Par mon âme aux enfers je me sentais porté.

*


Quelquefois, pâle et nu, dans l’antre solitaire,
Demandant compte au ciel des larmes de la terre,
Je disais : — Dieu jaloux, qu’as-tu fait pour tes fils !!!
Des monts de l’Immaüs aux débris de Memphis,
Les mortels dans leur sein, sans repos et sans ternie,
Ont porté le malheur, comme le fruit son germe !
Oedipe et Job, assis aux limites des temps,
Et de l’humanité sombres représentants,
Semblent verser sur nous, comme un flot sur des sables,
Du torrent des douleurs les eaux intarissables ;
Sur le même rocher usant nos deux genoux,
Leur tristesse incurable a pris racine en nous ;
Les pleurs contagieux de ces douleurs premières
Se sont pétrifiés à toutes les paupières.
Oedipe de son front fait jaillir ses deux yeux,
Sans s’arracher du cœur les crimes de ses dieux,
De ses dieux insensés qui ne savent l’absoudre
Qu’en couronnant sa mort des rayons de la foudre.
Jéhova contemplant son élu le plus cher,
Accepte le pari qu’ose offrir Lucifer,