Page:Soupé - Études sur la littérature sanscrite.djvu/173

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LE RAM AY AN A. 165

Le vrai poëme commence par la description du pays de Kausala, baigné par la Sarayoû, fertile en grains et en trou- peaux, et par le tableau de la florissante ville d'Ayodhyâ (l'Oude moderne), fondée par Manou, le prototype et le chef du genre humain. Cette cité d'Ayodhyâ se montre à nous comme le centre d'un formidable empire, et rien n'est épar- gné pour nous la faire admirer. Elle a six lieues de largeur sur vingt-quatre de longueur, des murailles imprenables, des fossés profonds, des portes nombreuses et garnies d'archers, des arsenaux encombrés d'armes, des machines de guerre (y compris, dit-on, des pièces à feu), des chars, des chevaux, des éléphants par milliers, une population considérable et heureuse, des rues bien arrosées, des maisons splendides, des bazars remplis de marchands, des boutiques étincelantes de joyaux, de brillantes fontaines, des marchés et des jar- dins publics, des arcs de triomphe ornés de bannières, des salles d'assemblée, des massifs de verdure, des temples et des autels pour tous les dieux, de joyeux festins, d'harmo- nieux concerts. On le voit : le Pékin actuel n'est pas aussi grand, Paris et Londres ne sont pas plus beaux. Là, règne l'honnête et illustre Daçaralha, qui a neuf mille ans environ ; car les auteurs indiens se préoccupent peu des vulgaires né- cessités delà chronologie, elles années, les siècles même ne leur coûtent guère. H est opulent et il est brave; il est puis- sant et il est juste; sous son sceptre paternel, la terre pour ses sujets est déjà un équivalent du swarga (paradis) ; c'est véritablement l'âge d'or :

Pas un homme dans toute la ville qui cherchât péniblement sa subsistance; pas un chef de famille qui fût mécontent; pas un avare ou un menteur, pas un traître ou un insolent, pas un être irascible ou cruel. Pas un qui manquât de magnanimité ou qui calomniât; pas un qui vécût aux dépens de la propriété d'autrui; pas un dont la vie ne dépassât un millier d'années ; pas un qui déplorât sa destinée ou qui ne comptât beaucoup d'enfants. Les époux ne se plaisaient qu'avec leurs épouses. Il n'y avait per- sonne qui ne portât des boucles d'oreilles, des pierres précieuses

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