Page:Soupé - Études sur la littérature sanscrite.djvu/237

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naît bientôt de Sudakshina ; l’amour que lui porte Dilipa est dépeint avec une simplicité touchante. Cet enfant, appelé Raghou (celui qui va loin) et qui donne son nom à l’ouvrage, doit être un héros. Il reçoit la tonsure comme tous les jeunes princes indiens, et on l’initie aux lettres : car l’éducation des héritiers présomptifs de la couronne n’était pas moins soignée dans l’Inde que chez les Juifs ou chez les Perses. Plus tard, après un combat de Raghou contre le dieu Indra lui-même, combat vraiment homérique, Dilipa l’associe à son pouvoir et abdique, non par dégoût et par lassitude, ainsi que Dioclétien ou Charles-Quint, mais pour se conformer à la tradition qui voulait que les monarques hindous allassent terminer au fond d’une pieuse retraite une longue vie, consacrée à l’exercice périlleux de l’autorité, aussitôt qu’ils avaient un successeur capable d’en soutenir le poids. Les mœurs que nous retracent ces poèmes sont d’une pureté, qu’on retrouverait rarement dans les admirables littératures de la Grèce ou de Rome et qui nous reporte vers l’épopée chevaleresque du moyen âge. Nous ne nous étendrons point sur les conquêtes, les voyages et les libéralités de Raghou. Tous ces kschattryas ou héros de la caste noble étaient aussi charitables que braves et aussi dévots qu’habiles: nous n’avons qu’un saint Louis dans toute l’histoire de France ; dans le Raghuvansa seulement, il y en a dix. Raghou reçoit à son tour des prêtres qu’il vénère la promesse d’un fils, la plus précieuse récompense possible pour un fervent sectateur des Védas. Ce fils vient à l’heure fixée ; il s’appelle Aja et, quand il est en âge de se marier, un prince voisin, Bhodja, lui destine sa sœur Indumati. Au moment où le jeune homme va se présenter à sa fiancée royale, il est attaqué par un éléphant sauvage ou plutôt par un génie céleste, condamné à revêtir cette forme ; il lui envoie une flèche dans le front ; aussitôt le génie recouvre sa première forme et fait présent d’un arc magique au guerrier qui l’a délivré.

L’élégance et la grâce, qualités habituelles de Kâlidàsa, se