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Page:Souriau - Histoire du Parnasse, 1929.djvu/64

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LIV
HISTOIRE DU PARNASSE

est inadmissible : le Parnasse de 1869 n’est que le second en date, et l’Anthologie n’est pas un livre avoué par les Parnassiens. Seuls comptent comme recueils officiels de l’Ecole les trois Parnasses de 1866, de 1869 et de 1876 : ils comprennent en tout quatre-vingt-quinze poètes qui, pour la plupart, n’apparaissent que dans un ou deux de ces recueils ; quatorze seulement figurent dans les trois volumes, et semblent tout d’abord constituer le bataillon sacré : Théodore de Banville, Cazalis, Coppée, Dierx, Emmanuel des Essarts, Heredia, Leconte de Lisle, André Lemoyne, Catulle Mendès, Mérat, Antoine Renaud, Xavier de Ricard, Sully Prudhomme et Valade.

Mais, sur ces quatre-vingt-quinze Parnassiens, combien y avait-il de vrais poètes ? Verlaine, du temps qu’il appartenait à l’École, n’en comptait qu’une dizaine au plus[1]. Jules Lemaître va jusqu’à la douzaine[2]. Il m’a semblé qu’on pouvait faire sortir du rang une quinzaine au moins de ces écrivains. Tous n’ont pas persévéré jusqu’à la fin. Plusieurs ont quitté l’école de L. de Lisle pour suivre leur route à eux. Je ne parlerai que de leur période parnassienne, et tâcherai de proportionner à leur valeur absolue l’étendue des chapitres qui leur sont consacrés. Je dresse au milieu de cette histoire la statué de Leconte de Lisle : les autres ne sont que des figures de bas-relief autour de son monument. Leconte de Lisle, sans le Parnasse, subsisterait tout entier ; sans lui le Parnasse n’eût été qu’une échaufïourée.

En 1884, Brunetière disait qu’on ne pourrait écrire l’histoire de cette École que dans une cinquantaine d’années[3] ; cela fait à peu près notre compte.


  1. Œuvres complètes, V, 407.
  2. Revue Bleue du 22 septembre 1883, p. 353.
  3. Histoire et Littérature, II, 208. — Il me reste à offrir ma gratitude aux érudits qui m’ont aidé dans mes recherches : MM. Gazier, bibliothécaire de l’Université de Besançon ; Labrosse, directeur des bibliothèques de Rouen ; Merle, archiviste colonial, conservateur du Musée Léon Dierx, et Foucque, professeur au Lycée Leconte-de-Lisle, à l’île de la Réunion. Pourrais-je oublier dans mes remerciements M. Frédéric Plessis, à qui je dois tant de renseignements inédits et précieux sur ce monde littéraire dont il est la dernière fierté ?