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FROISSART

n’hésite pas… soyons du côté des victimes quelles qu’elles soient ; du côté des châtelains, quand on les égorge, du côté des Jacques, quand on les extermine !

Après ce brillant coup de main, après cette délivrance inespérée, imaginez quels furent les transports de joie des réfugiés de Meaux, les félicitations des chevaliers, les sourires et les cajoleries des belles dames.

L’enthousiasme reconnaissant de la féodalité suivit jusque dans ses États le jeune vainqueur qui l’avait sauvée, qui l’avait vengée !

À partir de cette époque (1358), Gaston Phœbus ne se hasarde plus dans des expéditions lointaines ; il observe, il se recueille, il se fortifie. Le politique arrête et maîtrise le chevalier. Il sourit à la France, sans faire pour cela mauvais visage à l’Angleterre, bien résolu à ne sortir de cette neutralité courtoise, mais attentive, que lorsque son intérêt parlera haut ou que l’occasion sera telle qu’on ne puisse la laisser fuir sans forfaire à la fortune.

En attendant, il se débat avec le comte d’Armagnac, voisin turbulent qui lui disputait une portion de son héritage ; il le fait prisonnier dans une rencontre, et, malgré les sollicitations du prince Noir, il ne le lâche qu’après l’avoir durement rançonné. En 1375, il fait la guerre au duc de Berry qui venait de lui enlever le gouvernement du Languedoc. Il ne se brouille pas néanmoins avec le roi de France, dont l’épée, tenue