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À LA COUR DE GASTON PHŒBUS.

C’est à travers cette féerie de florins d’or et de luxe féodal qui éclaire la triste route parcourue, que les deux voyageurs arrivent à Morlaas. Connaissez-vous Morlaas ? Vieille ville enfumée, rues désertes et silencieuses, façade noire et lépreuse, grande place qui ne s’anime que les jours de marché. Au centre, une église gothique, aux ogives ébréchées, aux vitraux crevassés et déteints, aux nervures cassées ou disjointes. De la base au faîte, au lieu de cette ferme et fière vieillesse qui énorgueillit les monuments comme elle ennoblit les hommes, une vétusté qui donne froid à la pensée et au cœur. L’édifice, qui ne croule pas, mais s’émiette, raconte, à sa façon, lugubrement, la décadence de la ville. Morlaas, en effet, fut la première capitale du Béarn. Mais, sous les Moncade, elle se vit dépossédée au profit d’Orthez, dont la situation plus centrale et plus riante, au sein de la riche plaine du Gave, attira les souverains du pays.

Morlaas, néanmoins, garda son hôtel des monnaies, frappa les florins d’or du vicomte, c’était un assez bon privilége, et qui consolait un peu de la perte des autres. Les sous de Morlaas avaient d’ailleurs bonne renommée dans le monde féodal, et ils étaient acceptés comme type dans la plus grande partie de la Gascogne.

Malheureusement, tout à côté, grandissait Pau, qui, de simple poste fortifié, devint la capitale définitive du Béarn. Abusant du succès, comme tous les parvenus, Pau voulut avoir