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Page:Souvenirs d'enfance de Sophie Kovalewsky.djvu/261

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sophie kovalewsky.

dans une ville : à Stockholm elle ne connut jamais que les rues où elle passait pour se rendre à l’Université, ou chez ses amis les plus intimes ; jamais elle ne sut gouverner ses intérêts, tenir sa maison, s’occuper de son enfant, qu’elle laissait toujours à la garde d’autrui, en un mot la plupart des petits soucis de la vie lui étaient un pesant fardeau. Mais toujours, et comme à point nommé, elle trouvait quelque ami dévoué, qui se consacrait à ses intérêts, et sur lequel la charge en retombait. À chaque station de chemin de fer où, dans ses nombreux voyages, elle avait à s’arrêter, quelqu’un l’attendait, venu à sa rencontre pour lui retenir une chambre, l’accompagner à l’hôtel et lui rendre les petits services nécessaires. Et elle était si contente, si reconnaissante de se sentir protégée, de dépendre d’un autre pour ces petites choses, qu’elle exagérait parfois dans ce but, ainsi que je l’ai dit, ses appréhensions et son inexpérience. Quant à une dépendance, dans le sens sérieux du mot, elle en fut toujours incapable.

Dans une lettre en allemand, adressée à cet ami de Berlin qui lui avait appris à danser et à patiner, Sophie décrit ainsi sa vie à Stockholm pendant l’hiver de 1885 :


Stockholm, avril 1885.
« Cher Monsieur Hansemann,

« Je me sens très coupable de n’avoir pas encore répondu à votre amicale lettre. Mon excuse est dans