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Page:Souvenirs d'enfance de Sophie Kovalewsky.djvu/284

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ce qui fut, et ce qui aurait pu être.

terriblement malade, bien que le médecin prétende qu’elle soit comparativement mieux que ces derniers jours. C’est vraiment la plus terrible des maladies, longue, pénible et consumante. Elle souffre sans cesse, ne peut ni dormir ni respirer sans difficulté. Je ne sais combien de temps je resterai ici. Je soupire après Foufi (sa fille) et mon travail. Le voyage jusqu’ici a été long et difficile.

« Ton amie dévouée,

« Sonia. »


Pendant les longues journées et les longues nuits qu’elle passa auprès du lit de sa sœur malade, bien des réflexions, bien des souvenirs du passé, hantèrent son imagination. C’est alors qu’elle compara « ce qui fut » avec « ce qui aurait pu être ». En se rappelant les rêves enchanteurs avec lesquels sa sœur et elle étaient entrées dans la vie, jeunes, belles, richement douées toutes deux, elle songeait que la vie réelle avait été bien peu conforme aux illusions, aux mirages de leur imagination. Pour toutes deux la vie avait certainement été mouvementée et riche en impressions de tout genre, mais un sentiment amer d’espérance déçue couvait dans leur cœur.

« Ah ! combien tout aurait pu être différent, se disait Sophie, si toutes deux nous n’avions commis certaines erreurs capitales. »

Cette pensée lui donna l’idée d’écrire deux romans parallèles, qui décriraient l’histoire des mêmes personnes de deux façons opposées : on les verrait dans