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des gens qui, sous prétexte qu’ils ont du génie, croient qu’ils aiment (?) autrement que les autres. Ils ont donc tenu à ce que le monde entier soit au courant des péripéties de leur banale, si banale aventure ! Ils ont pris pour cela toutes dispositions. Leurs lettres… : je t’aime, je te désaime, je te re-aime ; nous… couchons, nous décou…, nous recou… Entre temps, nous cherchons de nouvelles distractions… Que d’encre a coulé pour noter de pareilles fadaises ! et si ordinaires ! !

À côté de ces fantaisies charnelles, des milliers d’êtres luttent pour la vie ; de braves gens consentent à faire leur devoir de citoyen ; ils acceptent de fonder une famille, en s’imposant un dur labeur. D’autres dépensent des trésors de dévouement pour se rendre utiles. Le renoncement, le sacrifice et même l’héroïsme sont le lot de ceux qui pratiquent le véritable amour ! Des travailleurs peinent, des intelligences d’élite cherchent la vérité, des malades souffrent, agonisent ; des deuils brisent les vies en déchirant les cœurs ; les éléments se déchaînent, entraînant des catastrophes effroyables. Le froid et la faim, la misère pèsent sur de pauvres existences et les détruisent…

Qu’est-ce que tout cela pour nos amoureux ? Seuls les plaisirs qu’ils s’offrent, les larmes qu’ils répandent valent d’être comptés. Ce ne sont pourtant que des parasites, des hors-la-loi. Ils ne pensent qu’à eux et à leurs satisfactions sans se douter que leur amour qu’ils croient sublime n’est que l’amour de soi, le plus pur égoïsme. Qu’ils sont donc ridicules et antipathiques ! Ce n’est rien de le dire.

J’admets néanmoins que les peine d’amour puissent être très cuisantes et dignes de compassion — si elles sont sincères. Est-ce que cela regarde le public ?


« La Rebelle » — Marcelle Tinayre

Je voudrais savoir à combien d’expériences les partisans du « droit au bonheur » limitent la recherche de ce bonheur. Farceurs !

Mauvais livre. Le droit au bonheur !… Je voudrais bien savoir ce qu’elle en aurait fait, l’héroïne du roman, si son mari avait eu le mauvais goût de persister à vivre. Cette rebelle est une femme qui a la chance énorme de rencontrer, libérée d’un mari fâcheux et d’un amant indigne, l’ami le plus tendre, le plus indulgent qui soit. On serait « rebelle » à moins.

Poser en principe le « droit au bonheur » c’est aboutir à l’union libre, avec les enfants élevés au petit bonheur. Il n’y a pas d’autre solution, car jamais deux êtres vraiment sensibles et délicats ne pourront