Page:Souvenirs et Reflexions.pdf/49

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Voilà… Il faudrait arriver à une indifférence absolue de l’opinion d’autrui en ce qui concerne nos faits et gestes. Agir le mieux possible, sans rechercher d’autre témoignage que de Celui en qui réside toute justice. Quêter l’approbation, c’est demander l’aumône, conséquemment être importun, d’ailleurs sans succès le plus souvent.


Il ne faut pas arborer sa vertu comme une cocarde à son chapeau.


Lorsqu’on exprime une opinion, que ce soit avec l’unique souci d’être vrai, et non de briller, de se mettre en valeur.


Une chose trop ignorée, c’est que, de même qu’un organisme malsain est un danger pour ceux qui évoluent autour de lui, une âme malade crée autour d’elle une ambiance, une contagion dangereuse pour les autres âmes.


Notre Seigneur a dit : « Si quelqu’un scandalisait un enfant, mieux vaudrait qu’on lui suspendît au cou une meule de moulin et qu’on le précipitât dans les profondeurs de la mer ! ». La mère chrétienne qui ne permet pas aux mauvaises pensées de s’attarder en elle, qui s’applique au contraire à développer le sens du bien et du beau, ne sait pas quelle atmosphère purifiante, bienfaisante elle crée autour d’elle, dont ses enfants bénéficieront. Cajoler, gâter n’a aucune valeur morale. On se croit bon parce que l’on s’attendrit ; c’est une erreur. L’enfant gâté sera de plus en plus exigeant ; il se révoltera dès qu’on refusera de céder à ses caprices, lesquels se multiplieront par l’assentiment qu’on y donne et qui n’est souvent que de l’indolence. Céder, pour avoir la paix momentanément, c’est s’exposer à des perpétuels assauts. Cela s’appelle, mot très actuel, le pacifisme. Traduisez lâcheté, et ne confondez pas le pacifiste avec le pacifique : ils sont à l’opposé l’un de l’autre.


Est-il un esclavage plus humiliant que celui de la mode ? Comment un être intelligent et fier peut-il abdiquer sa liberté et s’enrôler dans un troupeau qui ne sait même pas à quel berger il obéit. Servilement, il emboîte le pas à la fantaisie, au caprice… ou plutôt, dans la plupart des cas, il se prête, sans y songer, à des combinaisons de mercantis guidés par leur intérêt. Admettons que l’on soit obligé de suivre la mode dans une certaine mesure, celle qui consiste à éviter de se faire remarquer. On le fait à contre-cœur, mais enfin il faut se soumettre. Il ne s’ensuit pas que l’on doive observer d’un œil avide les métamorphoses d’une déité fantasque, et se rendre à toutes ses injonctions.