Page:Souvestre, Laurens de la Barre, Luzel - Contes et légendes de Basse-Bretagne.djvu/148

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s’appelait Allanic, et sa mère Godic ou Marguerite. Quand Allanic eut atteint l’âge de quatorze ou quinze ans, comme il était vigoureux et bien portant, et que néanmoins il continuait de mendier avec sa mère, souvent les paysans disaient à celle-ci :

— Il est grand temps, Marguerite, que ce gaillard-là travaille aussi pour gagner son pain ; vous l’avez nourri assez longtemps à rien faire, à son tour à présent de vous aider aussi. Voyez donc comme il est fort et bien portant ! n’as-tu pas de honte, fainéant, de rester ainsi à la charge de ta vieille mère ?

Tous les jours, c’étaient de semblables réprimandes, et tous les jours aussi ils rentraient, le soir, avec leur besace plus légère. Ce que voyant Allanic, il dit à sa mère :

— Je veux aller en France, mère, pour essayer de gagner ma vie, et vous secourir à mon tour.

Godic éprouva du chagrin de la résolution de son fils ; mais elle comprit pourtant qu’elle ne pouvait le retenir toujours, et ne s’opposa pas à son départ.

Allanic partit donc, par un beau matin de printemps, emportant, au bout d’un bâton, un pain de seigle, avec six crêpes, et tout fier d’avoir dans sa poche six réaux (un franc cinquante) que lui avait donnés sa mère. Il allait à l’aventure, à la grâce de Dieu. Vers midi, il remarqua sur le bord de la route qu’il suivait une