Page:Souvestre, Laurens de la Barre, Luzel - Contes et légendes de Basse-Bretagne.djvu/19

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et non pas nous. — Cependant, M. Mariette, il va de soi qu’une ligne qui commence de cette façon, ne peut pas tourner brusquement et finir de cette autre façon. Le bon goût… — Mettez, M. Schmitz, votre bon goût dans votre poche. Nous faisons de l’égyptien antique. L’égyptien antique met des yeux de face aux têtes de profil ; il plante les oreilles sur le haut du crâne, comme un plumet de garde national. Tant pis pour l’égyptien antique. »

M. Luzel est le Mariette de la Basse-Bretagne traditionnelle. Souvestre écrivait en homme de lettres épris d’une esthétique originale ; du Laurens, notaire puis juge de paix, était un bon Breton et un bon chrétien qui employait ses loisirs à des recherches attrayantes ; M. Luzel dévoue son existence à une idée scientifique. Il n’affiche pas, après Souvestre, la prétention de rédiger les Mille et une Nuits de la Bretagne ; il ne s’efforce pas, après du Laurens, de formuler la morale en action de son pays ; il a en vue une statistique, et il l’établit sur des bases solides. Archiviste du Finistère, il se met en quête de documents, les découvre et en assure la conservation. Rien n’arrête ce « Juif Errant de la Basse-Bretagne » ; et aujourd’hui, qu’après trente ans de courses laborieuses, il a déposé à la Bibliothèque Nationale une soixantaine de vieux mystères manuscrits, qu’il a publié quatre volumes de Gwerziou et de Soniou, et qu’il en a fait paraître sept autres sur les contes et les légendes des Bas-Bretons, il peut contempler son œuvre avec le légitime orgueil du travailleur sagace et patient qui a le plus amassé pour la littérature orale de Breiz-Izel.

Ce qui distingue sa moisson, c’est à la fois le nombre des épis et la qualité du grain. Dans les Contes bretons (1870), dans les Veillées bretonnes (1879), dans les Légendes chrétiennes (1882) puis dans les Contes populaires de Basse-Bretagne (1887), il n’y a pas moins de cent cinquante récits. Beaucoup, certes, ne sont que des variantes, et le collectionneur le sait bien, puisque, dans les deux derniers ouvrages, il les a classés par cycles, c’est-à-dire par versions groupées autour de types traditionnels impersonnalisés, de circonstances ou de mythes. Mais il n’est pas moins vrai qu’aucun des recueils antérieurs ne serait