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— Eh bien ! mon père, demanda Christic au vieux moine, que dites-vous de ce qui s’est passé, la nuit dernière, et croyez-vous, à présent, que je sais quelque chose ?

Mais le vieillard murmurait toujours et n’appelait Christic que gamin, morveux et autres noms semblables. Ils arrivèrent bientôt dans une petite ville où l’on conduisait au cimetière, en grande pompe, le corps d’un jeune enfant riche, qui venait de mourir. Tout le monde était en grand deuil, et beaucoup pleuraient. Ce que voyant le vieux moine, il se mit à pleurer aussi. Mais Christic, lui, riait. Le vieillard, en colère, lui dit :

— Comment, morveux ! Tu vois les autres pleurer et tu ris ?

— Oui, sûrement, mon père, et je crois que j’ai lieu de rire plutôt que de pleurer, en voyant sauvées trois âmes exposées à être damnées.

— Comment cela ? Que veux-tu dire ?

— Les parents de cet enfant auraient été trop vaniteux et trop glorieux, si leur enfant leur était resté, et Dieu le leur a enlevé, pour les empêcher de se perdre tous les trois, le père, la mère et l’enfant.

Ils continuaient de marcher, les deux jeunes garçons devant, causant et riant, et le vieux moine derrière, grommelant toujours