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Page:Souvestre - Au bord du lac, 1852.djvu/142

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le chevrier de lorraine.

honnêtes, celui des garçons respirait une simplicité franche, et la plus jeune fille s’avançait en chantant comme un oiseau ; mais sa sœur aînée, qui venait la dernière, avait dans toute sa personne quelque chose de doux, de fort et de pur qu’on ne pouvait voir sans en demeurer frappé. Elle marchait plus lentement, et répétait à demi-voix une prière qui semblait l’absorber tout entière, lorsqu’une rumeur se fit entendre subitement dans la foule.

Tous les yeux venaient de se tourner vers la route, sur laquelle s’élevait un nuage de poussière.

— Ce sont les gens de Marcey qui viennent à l’attaque ! s’écrièrent plusieurs voix.

Et une terreur panique s’emparant des femmes et des jeunes filles, toutes se mirent à fuir du côté du village.

Marcey tenait en effet pour les Bourguignons, et sa jeunesse avait eu plusieurs fois des rencontres avec celle de Domremy. Mais cette fois l’épouvante fut de courte durée ; le nuage, en s’approchant, permit de voir qu’il ne s’agissait que de cinq à six jeunes garçons qui en poursuivaient un autre à coups de pierre en criant :

— Tue ! tue l’Armagnac !

Quelques hommes de Domremy, qui n’avaient point partagé l’effroi général, n’eurent qu’à répondre par le cri : — Tue ! tue les Bourguignons ! pour faire rebrousser chemin aux assaillants, qui reprirent, en courant, la route de Marcey.