Page:Souvestre - Au bord du lac, 1852.djvu/195

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
182
au bord du lac.


§ 6.


L’annonce des succès obtenus par cette fille inconnue qui conduisait l’armée française au nom de Dieu et de l’arrivée de la cour à Loches, avait singulièrement réjoui le jeune homme ; il le fut encore bien davantage en apprenant que Jeanne la Pucelle venait de reconquérir successivement, sur les Anglais, Jergeau, Meung, Beaugency, et que le roi s’avançait avec elle vers la Beauce.

Son conducteur et lui changèrent aussitôt de direction ; remontant vers le nord, ils laissèrent Orléans sur leur gauche, et atteignirent la lisière des bois de Neuville.

Jusqu’alors le Père Cyrille avait supporté les fatigues du voyage à force de bonne volonté ; mais la route devenait de plus en plus difficile, et le courage seul ne pouvait suffire pour en surmonter les difficultés. Les deux voyageurs traversaient un pays ravagé par le passage récent des Anglais, qui évacuaient les villes et les châteaux où ils avaient jusqu’alors tenu garnison. Ils s’étaient retirés en ne laissant partout que solitude et ruines. Les provisions de nos voyageurs s’épuisèrent sans qu’ils pussent les renouveler ; il fallut vivre de racines et d’herbes sauvages arrachées aux bords des sillons en friche. Depuis trois jours ils n’avaient rencontré aucun être vivant. La pluie tombait presque continuellement sans qu’ils pussent trouver