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le chevrier de lorraine.

et qui est comme le privilège du premier-né. Mon fils avait trois ans quand je la lui appris… S’il ne l’a point oubliée, s’il peut seulement en répéter quelques mots, le doute est impossible ; car lui et moi sommes seuls à la connaître.

Et cherchant du regard autour d’elle celui qui pouvait être son fils, la veuve se mit à murmurer d’une voix tremblante :

— « Sainte Clotilde ! toi qui n’as point d’enfant dans le paradis, prends le mien sous ta protection ; sois près de lui quand je n’y serai pas, ici, ailleurs et partout. »

Elle s’arrêta palpitante comme si elle eût attendu la réponse à cette espèce d’appel. Tout à coup une voix ferme et jeune se fit entendre et continua :

— « Sainte Clotilde ! je te donne mon fils petit pour que tu m’en fasses un homme, et faible pour que tu me le rendes fort ! Retranche trois de mes jours pour lui en ajouter dix, et prends toutes mes joies pour lui en donner cent fois davantage ! »

La dame de Varennes poussa un cri, tendit les mains et tomba à genoux.

— Il sait la prière ! balbutia-t-elle… C’est lui… Mon fils !

— Ma mère ! répondit la voix.

Et le rideau, brusquement tiré, laissa voir Remy, qui s’élança dans les bras de la veuve !…

On ne raconte point de telles scènes. Tout se borna longtemps à des sanglots de joie, à des noms échangés,