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au bord du lac.

un moine de Saint-François qui arrivait par un autre sentier, se dirigeant également vers Rillé.

C’était un homme déjà vieux, mais dont le visage épanoui respirait je ne sais quelle bonté active. Il portait un bâton, une cape, et une corde en bandoulière, à laquelle étaient passées une miche de pain bis et une gourde en forme de missel. Catherine le salua.

— Bonjour, mon enfant, dit le moine ; d’où venez-vous donc ainsi, à une heure où tout le monde travaille aux champs ?

— Je viens de chez le prévôt, mon père, répondit Catherine d’un accent ému.

— De chez le prévôt ! Auriez-vous quelque démêlé avec la justice ?

— Non pour moi, mais bien pour mon cousin Jehan.

— Quelle faute a-t-il donc commise ?

La jeune fille raconta ce qui était arrivé la veille, et comment Jehan avait été conduit aux prisons du château.

— Dieu le sauve ! dit le Père Ambroise (c’était le nom du franciscain) ; j’ai vu passer, il y a une heure, le comte Raoul avec toute sa suite, et l’on eût dit un orage d’été. Un de ses écuyers a raconté au village qu’il avait été désarçonné trois fois au tournoi d’Angers, et qu’il en avait la rage au cœur.

— Ah ! que dites-vous là, mon père ? s’écria Catherine ; l’intendant va profiter de cette humeur noire pour lui parler de Jehan, et ils le feront pendre aux fourches du château !