Page:Souvestre - Un philosophe sous les toits, 1854.djvu/162

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petite boutique de fruitière. Ailleurs, peut-être, je serais mieux servi ; mais la mère Geneviève a peu de pratiques ; la quitter serait lui faire un tort et un chagrin volontaires ; il me semble que l’ancienneté de nos relations m’a fait contracter envers elle une sorte d’obligation tacite ; ma clientèle est devenue sa propriété.

Elle a posé le panier sur ma table, et comme j’avais besoin de son mari, qui est menuisier, afin d’ajouter quelques rayons à ma bibliothèque, elle est redescendue aussitôt, pour me l’envoyer.

Au premier instant, je n’ai pris garde, ni à son air, ni à son accent ; mais maintenant je me les rappelle, et il me semble qu’ils n’avaient point leur jovialité habituelle. La mère Geneviève aurait-elle quelque souci ?

Pauvre femme ! ses meilleures années ont été pourtant soumises à d’assez cruelles épreuves pour qu’elle regardât sa dette comme payée ! Dussé-je vivre un siècle, je n’oublierai jamais les circonstances qui me l’ont fait connaître et qui lui ont conquis mon respect.

C’était aux premiers mois de mon établissement dans