Page:Souvestre - Un philosophe sous les toits, 1854.djvu/251

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Qui sait si mon orgueil n’a point provoqué le même souhait de la part de quelqu’un de mes frères qui ne voient pas ?

Mais combien plus souvent encore j’ai failli par imprudence et par légèreté! Que de résolutions prises à l’aventure ! que d’arrêts portés dans l’intérêt d’un bon mot ! que de mal accompli faute de sentir ma responsabilité! la plupart des hommes se nuisent les uns aux autres pour faire quelque chose ! on raille une gloire, on compromet une réputation, comme le promeneur oisif, qui suit une haie, brise les jeunes branches et effeuille les plus belles fleurs. Et cependant notre irréflexion fait ainsi les renommées ! Semblable à ces monuments mystérieux des peuples barbares auxquels chaque voyageur ajoutait une pierre, elles s’élèvent lentement ; chacun y apporte en passant quelque chose et ajoute au hasard, sans pouvoir dire lui-même s’il élève un piédestal ou un gibet. Qui oserait regarder derrière lui pour y relever ses jugements téméraires ?

Il y a quelques jours, je suivais le flanc des buttes vertes que couronne le télégraphe de Montmartre.