Page:Souvestre - Un philosophe sous les toits, 1854.djvu/29

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Appelons ici tous les héros de son œuvre : Gil Blas, Fabrice, Sangrado, l’archevêque de Grenade, le duc de Lerme, Aurore, Scipion ! Plaisantes ou gracieuses images, surgissez devant mes yeux, peuplez ma solitude, transportez-y, pour mon amusement, ce carnaval du monde dont vous êtes les masques brillants.

Par malheur, au moment même où je fais cette invocation, je me rappelle une lettre à écrire qui ne peut être retardée. Un de mes voisins de mansarde est venu me la demander hier. C’est un petit vieillard allègre, qui n’a d’autre passion que les tableaux et les gravures. Il rentre presque tous les jours avec quelque carton, ou quelque toile, de peu de valeur sans doute ; car je sais qu’il vit chétivement, et la lettre même que je dois rédiger pour lui prouve sa pauvreté. Son fils unique, marié en Angleterre, vient de mourir, et la veuve, restée sans ressources avec une vieille mère et un enfant, lui avait écrit pour demander asile. M. Antoine m’a prié d’abord de traduire la lettre, puis de répondre par un refus. J’avais promis cette réponse aujourd’hui ; remplissons, avant tout, notre promesse.